22-12-2010 | SKI ALPIN


Allais - La légende d'Emile

Un livre, un homme, une vie, une histoire par Gilles Chappaz et Karen Allais un livre né aux éditions Guérin.

Emile Allais ou l’histoire du ski Français,1er Médaillé Olympique, 1er Champion du Monde, 1er Moniteur, 1er Pisteur , champion de ski, concepteur avant gardiste , et créateur de stations.

Emile Allais a marqué l’histoire du ski moderne en dessinant une trace qui jamais ne s’effacera , Émile Allais s’est retrouvé, et jamais par hasard, à l’origine de tous les moments fondateurs du développement du ski.

Après avoir été le premier tricolore médaillé olympique à Garmisch-Partenkirchen en 1936, il devient à Chamonix, en 1937, le premier champion du monde de ski français.
Dans l’élan de ces succès historiques, il est le premier moniteur de ski diplômé (il porte toujours la médaille n°1) et crée la première technique française digne de ce nom.

Premier champion français à l’export, il participe alors Outre-Atlantique à la création de stations aujourd’hui de réputation internationale (Sun Valley, Squaw Valley, Portillo du Chili, Bariloche, etc.). De retour en France, à Courchevel, il «invente» le métier de pisteur secouriste et oeuvre, pour Rossignol, au développement de skis« mythiques » notamment le célébrissime Allais 60.

Inlassable défricheur, il met ensuite son expérience, sa disponibilité et son enthousiasme au service de La Plagne, Flaine, Vars, les Ménuires et d’autres grandes stations nées dans les années 60 bref, pendant un demi-siècle, partout où il faut innover et créer, Emile Allais est là, tour à tour champion, technicien, conseiller technique, bâtisseur, aménageur, visionnaire.

Sa vie est une légende !

Emile Allais est né à Megève le 25 février 1912. Simple fils de boulanger, il a révolutionné le ski français. Au début des années 30, il va voir le tailleur mégevan Armand Allard et lui demande d’élaborer un pantalon plus aerodynamique pour la pratique du ski : ce sera l’invention du fuseau.

Aux Jeux Olympiques de 1936 à Garmish, il remporte la médaille de bronze au combiné, puis en 1937 à Chamonix, il réalise le triplé en devenant Champion du monde de descente, slalom et combiné. Dans la mouvance de ces exploits, il invente la « méthode française » de ski qui supplantera la méthode autrichienne.

Ainsi, il devient le premier « pull rouge », c'est-à-dire le premier moniteur de l’école du ski français, dont il porte toujours la médaille numéro un. Il participe ensuite à la création de stations de ski sur le continent américain (Sun Valley, Squaw Valley, Portillo, etc.) et en France (Courchevel, Flaine, etc.). Il créera aussi, avec Rossignol, des skis : Allais 60 , Allais Major, etc.

Aujourd’hui, ce paisible retraité de 98 ans continue de skier sur les pentes de Megève (sa piste préférée est Les Mandarines, sur le Mont d'Arbois). Il porte un regard lucide sur son village, reconnaissant que le domaine skiable pourrait être amélioré par de nouvelles liaisons et qu’il manque quelques hôtels quatre étoiles à la station.

Au cœur des années 20, les parents d’Émile décident de changer de métier fini la boulangerie et le bûcheronnage, le couple construit son hôtel, le Beau Site, à deux pas du palace du Mont d’Arbois.

Un hôtel plus accessible, pour une clientèle familiale, moins fortunée : “Une bonne idée !”. Émile est désormais au cœur de l’évolution touristique de son village. Une aubaine. « J’ai tout de suite cherché à me faire engager comme “porteur” des caravanes que je voyais passer. Ce qui a été très vite fait auprès de mon oncle Hilaire ! » Dès 1925, au rythme de sept à huit heures de ski par jour, il est un porteur zélé dans le sillage de son tonton, accompagnateur très prisé. Émile fait tranquillement le plein de muscles, de globules et d’expérience.

Le ski est pour lui une porte ouverte sur un autre monde : « Il y avait par exemple le comte Montefiore qui se déplaçait beaucoup. On allait de Megève aux Contamines, à Hauteluce, Notre-Dame-de-Bellecombe, à Chamonix même. Pour moi, la vraie technique de mes débuts, c’était ces balades dans la montagne vierge et l’acrobatie sur les skis, sauts périlleux, sauts sur les bâtons. C’était merveilleux ! »

De retour à l’hôtel familial, Émile Allais a tout loisir de lorgner sur le palace voisin, le magnifique Hôtel du Mont d’Arbois de la Baronne Noémie de Rothschild, qu’il a la chance parfois d’accompagner dans ses randonnées. Il y observe d’élégants skieurs aux pulls rouges qui distillent leur savoir, le sourire entendu et la raie sur le côté, impeccable. Pour initier leur riche clientèle aux joies du ski, la baronne, et son “responsable des sports”, l’élégant Monsieur Parodi, ont en effet fait appel à des moniteurs autrichiens, formés par Hannes Schneider, l’inventeur de l’enseignement du ski, et du mythique stem-boggen, le virage à la mode !

Parmi ces moniteurs mondains, un skieur de belle stature, à la technique sophistiquée, un certain Otto Lantschner, Tyrolien pur sucre, moniteur formé à l’école de Hannes Schneider. Très impressionné par cet Otto de course, qui descend dans un style impeccable les pentes du Mont d’Arbois, le jeune Émile ne le quitte pas des yeux et le suit à la trace. Intrigué par ce gamin qui ne lui lâche pas le knickerbocker et qui se débrouille pas si mal, le moniteur mondain lui lance enfin : « t’as envie que je t’apprenne ? ». Tu parles si il veut Émile !

Dès lors, Otto Lantschner va le prendre sous son aile et lui inculquer ses secrets de la glisse.
Émile, esprit curieux et perfectionniste dans l’âme, ouvre grand ses oreilles, observe à tout-va, se nourrit de la science de son premier maître, et, s’en rend-il seulement compte, « rationalise » son approche du sport. Rien ne doit jamais être laissé au hasard, dans quelque domaine que ce soit.

Est-ce par simple goût du jeu, par besoin vital de se dépenser, par envie de se dépasser toujours, ou est-ce déjà par intuition inspirée et anticipation calculée ? - allez savoir avec un tel gaillard -, toujours est-il qu’il comprend avant tout le monde le profit à tirer d’une condition physique et d’une gestuelle impeccables. Et lorsque, à la demande du club de ski, débarque à Megève un moniteur d’éducation physique, le jeune Allais suit son enseignement avec un enthousiasme gourmand, le même enthousiasme avec lequel il a emprunté les traces de son oncle Hilaire et d’Otto l’Autrichien.

Le type installe des barres parallèles, un cheval d’arçon et une barre fixe, transforme un coin de la plaine de Megève en petit stade d’altitude, apprend aux gamins un peu gauches l’art du mouvement juste. Émile est évidemment le plus assidu. Il en fait plus qu’à son tour. Et râle même parce que ces installations sommaires sont en plein air : « Quand il pleuvait, on couvrait tout ça, ça m’a toujours peiné qu’on n’ait pas un abri, c’était dommage. Vraiment dommage ! »
Émile va même s’essayer, avec succès, au saut à la perche. « Avec des trucs en bois au début, et comme je sautais pas mal, j’ai fini avec une perche en bambou qui pliait un peu. » Et avec cette perche qu’il sait faire plier avec justesse, il passe des barres de plus en plus élevées. Des hauteurs dignes des spécialistes aguerris.

Tour à tour hockeyeur, cycliste, gymnaste, ou perchiste, Émile est décidément un brillant touche-à-tout. « J’avais le sport dans le sang » reconnaît-il dans un fier sourire.

Le sport et la bougeotte.

Toujours en mouvement, il n’en manque pas une lorsqu’il s’agit de faire valoir ses dispositions naturelles. Il n’est pas rare par exemple de le voir en opposition grimper entre les deux maisons voisines ou monter sur les toits boucher les cheminées et faire croire aux occupants qu’elles tirent mal ! Galopin avec ça ! Et lorsqu’un jour de fête au village, il s’agit d’aller chercher au sommet d’un mât de cocagne passé au savon noir des jambons et des boîtes de biscuit, qui est le seul à réussir à décrocher le gros lot ?

Émile, bien sûr, qui sacrifie à l’occasion sa culotte du dimanche toute neuve portée pour les vêpres. La taille du jambon, la qualité des produits ramenés et le calibre de sa démonstration l’exonéreront heureusement des réprimandes maternelles…

Mais, voyez comme les choses sont bien faites, c’est finalement sur les pistes, skis aux pieds, qu’Émile va démontrer l’excellence de ses chromosomes montagnards et la valeur intrinsèque de ses gènes athlétiques. Ce qui l’a conquis en premier dans ce sport balbutiant ? « Je crois que c’est le fait de la vitesse. Oui, même si on n’allait pas très vite, j’aimais la sensation de vitesse que procure la glisse. La vitesse et aussi un certain sentiment de liberté. »

En  photo (DR) EMILE ALLAIS, A.DUVILLARD et N.MOREL.

 

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